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Clarisses aux Pays-Bas
Lors d'un séjour dans le nord du pays, j'ai eu sous les yeux un magazine catholique néerlandais assez conservateur qui annonçait une fondation de Clarisses américaines à Eindhoven, aux Pays-Bas. Je viens de m'apercevoir qu'il ne s'agit pas d'une fondation. En fait, une communauté de clarisses-colettines sur le déclin avait demandé de l'aide à un monastère américain du même ordre. Quelques années après l'arrivée de ces renforts, le monastère a déménagé à Eindhoven, dans un couvent d'où les dernières sœurs trop âgées venaient de partir pour une maison de repos.
L'on trouve à leur sujet plusieurs vidéos sur youtube nous montrant quelques petits reportages au sein de cette communauté. Nous y voyons les nonnes aller nu-pied à l'intérieur du monastère, les sandales ne sont portées qu'à l'extérieur. Elles portent un habit d'un autre âge. Il n'y a pas de grilles au parloir mais une vitre. Elles se tiennent les mains jointes, paume sur paume au début de l'office où l'on reconnaît des mélodies grégoriennes. Dans l'une de ces vidéos, l'on apprend qu'elles sont dix. Elles ont un site en ligne, mais certains liens renvoient vers des articles en anglais, alors que les Américaines arrivées au milieu des années nonante. Un coup d’œil à leur horaire nous apprend que leur sommeil est interrompu et que le temps accordé au repos nocturne est vraiment fort court.
Certes, un tel décorum attire des jeunes vocations. Cela se comprend parce que les jeunes générations sont souvent en mal de repères. Un cadre structuré avec une identité qui s'affiche partout et de multiples façons, par les vêtements, les us et les coutumes très marquées offrent justement des balises et des repères. Je ne présume pas de la vie intérieure de ces nonnes : Dieu seul connaît le cœur des gens. Je m'interroge seulement sur la raison de l'implantation aux Pays-Bas de ce conservatoire d'anciens usages.
La communauté était mourante, fallait-il importer des nonnes d'un autre continent pour le renflouer alors que le charisme de l'ordre est bel et bien vivant dans la région ? Attirer des vocations, ce n'est pas tout. Il faut encore les garder. Je ne parle pas de les garder jusqu'à la profession mais sur le long terme, c'est à dire plus de dix ans. Les anciens usages attirent, mais à la longue, ils peuvent s'avérer usant. Il arrive un âge où on acquiert, par la force des choses une maturité, un recul sur la vie telle qu'on puisse en arriver à rejeter ce qui avait d'abord attiré. Au demeurant, un petit tour sur la toile m'apprend que si le couvent a accueilli dix candidates en une vingtaine d'années, seules deux d'entre elles ont persévéré.
Il se fait que, dans la même ère géographique, à Megen, dans le Brabant néerlandais, l'on trouve un couvent de clarisses qui lui a suivi un aggiornamento plus significatif. Les nonnes portent un habit, mais avec une coiffe plus légère et plus pauvre à mes yeux. Le message transmis est le même, encore que je le trouve plus profond, plus réfléchi. Le ton n'est pas ampoulé mais actuel, les manières sont plus simples, plus détendues. La clôture est vécue de façon plus souple, plus intérieure. Si les balises visibles ne sont plus là, la clôture est pourtant une réalité. Les sœurs ne sortent pas sans nécessité, mais elles acceptent des hôtes pour des retraites spirituelles.
La moyenne d'âge est certes plus élevée à Megen, mais la profondeur de la réflexion est présente. En feuilletant simplement cet album, même sans connaître le néerlandais, on découvre une communauté où l'on sait faire la part des choses, entre les signes extérieurs pas forcément essentiels et justement cet essentiel. Pour ce que j'en connais, le charisme franciscain me paraît mieux incarné par la simplicité de ces nonnes que par les manières compassées des premières.
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