• Sainte pauvreté, pauvre sainte qui n'ira pas au ciel

    "Sainte Pauvreté, pauvre sainte qui n'ira pas au ciel". Ce bon mot n'est pas de moi, mais d'une sainte canonisée. Encore quelques histoires de nonnes qui ont raté le coche, question pauvreté.

     

    L'histoire s'est passée dans le dernier quart du XXe siècle, et comme toujours: l'histoire que vous allez lire est vraie, seuls les noms ont été changé, etc.

     

    Il y avait à Villepont un couvent de soeurs de Ste Chlorophyle. Elles étaient âgées et peu nombreuses, moins d'une dizaine.  Pour dépanner une connaissance qui avait un revers de fortune, un ami de l'évêque du lieu, proposa aux nonnes de l'engager comme homme à tout faire. Quel était son travail exact ? On se perd en conjonctures: jardinier, régisseur, confident ... ? Quoiqu'il en soit, les vieilles nonnes s'entichèrent de cet homme en pleine jeunesse et il profita de son ascendant pour leur faire prendre une orientation bien loin du charisme de leur ordre.  Les soeurs se mirent peu à peu à mener une vie bien différente de celle qu'elles avaient vécue jusque là. Le luxe s'infiltra puis s'installa entre les murs du cloître. On acheta des voitures hors de prix, une calèche, des chevaux, enfin toute sorte de choses dont les nonnes ne font habituellement pas usage.

     

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    Et puis le scandale éclata. Une novice sortit, accusa l'homme à tout faire de malversations et ... d'utiliser des arguments "frappants" pour convaincre l'abbesse de faire certains investissements. Il l'aurait même envoyée à l'hopital. Entre temps, les nonnes vendirent leur couvent pour une coquette somme et prirent la poudre d'escampette. Elles venaient d'acquérir un château à l'étranger. L'homme à tout faire ne put les y suivre. Il fut inculpé pour faux et usage de faux, ainsi que pour coups et blessures. La justice mit les biens des nonnes sous séquestre et l'évêque les rappela à l'ordre: elles avaient manqué à leurs voeux de pauvreté et d'obéissance.

     

     

    Les vivres étaient coupés, et le beau château se révéla être insalubre et couvert de moisi. L'abbesse fut démise de ses fonctions, les nonnes rentrèrent, contrites, au pays et emménagèrent dans un endroit plus propice à leur mode de vie.  L'homme à tout faire s'en sortit avec une peine de prison avec sursis et une amende. Un livre puis un téléfilm fut tiré de cette aventure, peu édifiante. Les archives d'un quotidien sur la toile relate encore cette triste saga. Pourtant, aujourd'hui, la communauté s'est relevée de ses mésaventures et mène une vie digne de ses engagements. 

     

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    À la même époque, à Port-sur-l'eau, un autre couvent de chlorophylites faisait parler de lui. Là encore, quelques soeurs âgées et une nouvelle recrue bien plus jeune, qui une fois ses voeux prononcés, ne tarda pas à devenir abbesse. Le nombre de soeurs se réduisaient au fil du temps, le couvent était bien trop grand pour la poignée de nonnes restantes. Les plus âgées étaient mal en point. Les dernières religieuses, grabataires, cantonnées dans une aile du bâtiment, n'étaient plus conscientes de ce qui se tramait. L'abbesse prit bien soin d'elles mais, avec sa fortune personnelle, elle racheta le couvent et le transforma en hôtel de luxe. La supérieure quitta ses habits de nonne et mena une vie mondaine. On raconte qu'elle se promenait dans la ville au volant d'une mercedes, en fumant le cigare. Elle finit par être relevée de ses voeux. Quant à l'hôtel, il fit faillite quelques années plus tard et tout ce qui restait de l'ancien couvent fut liquidé en vente publique.

     

     

    Crédits photos : Edouard Boubat, La religieuse: Jacques Rivette


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