• Puisqu'un film, inspiré de son roman, sortira en salle au printemps prochain, [article rédigé en février 2013] penchons-nous sur cette oeuvre. Avant de parler de La religieuse de Diderot, il faut parler de la soeur religieuse du même Diderot. En effet,  Angélique, la soeur du philosophe,est entrée vers l'âge de dix-neuf ans chez les Ursulines. Personne ne l'y a poussée, ses parents se sont même employés à l'en dissuader. Elle y meurt folle, une dizaine d'années plus tard. L'austérité de la vie monacale est sans doute la cause de son aliénation et de son décès précoce.

     

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    Diderot commence son roman douze ans après le décès de sa soeur. C'est qu'une autre affaire fait jaser dans les salons. Une certaine Marguerite Delamarre en a appelé au parlement, c'est à dire au tribunal, contre ses voeux. N'oublions pas que nous sommes à une époque qui ne connaît pas la séparation de l'Eglise et de l'Etat.  Cette nonne est entrée en religion parce que sa mère l'a convaincue d'expier ainsi sa naissance adultérine. Marguerite Delamarre est déboutée de sa demande et finit ses jours au couvent.

     

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    Ce qui va devenir au roman est, au point de départ, un canular. Diderot veut convaincre un de ses amis, le marquis de Croismare, de revenir à Paris et, pour l'en persuader, il lui envoie la requête d'une certaine Suzanne Simonin, cloîtrée contre sa volonté qui , déboutée de sa requête d'être relevée de ses voeux, a fini par s'enfuir et se tient terrée dans l'attente d'être secourue. Le texte final du roman est en ligne, on le trouve sur wikisource.

     

    Mais qu'en est-il pour le fond du texte ? Quelle est la part de vérité ? On ne doit pas perdre de vue que Diderot est fortement anticlérical et ce serait une erreur de considérer sa prose comme une peinture exacte de la vie des monastères au XVIIIe siècle. Il faut d'abord se resituer dans l'époque où les religieuses sont moins nombreuses que les religieux, et, proportionnellement, beaucoup moins nombreuses qu'elles ne le seront à la fin du XIXe siècle et au début du XXe. Ce qui fait dire à certains que la "crise des vocations", tout du moins, en ce qui concerne les nonnes, n'est jamais qu'un retour à la normal après une explosion de vocations inhabituelle dans l'histoire.

     

     

    Force-t-on ses enfants à entrer dans les ordres contre leur gré, sous l'Ancien Régime ? La réponse est positive, mais les cas sont beaucoup moins fréquents que ne le laissent supposer certains libertins et ils touchent davantage les garçons que les filles. Il faut savoir qu'un religieux, à cette époque, n'hérite pas. On a donc tout intérêt à encourager à se cloîtrer les enfants d'un premier lit quand il y a remariage, pour avantager les enfants du nouveau conjoint. Certains parents usent de moyens de persuasion assez musclés : enfermement, coups, menaces de déportation aux Amériques, ou d'enrôlement dans l'armée pour les garçons.

     

    Accueillir des vocations forcées peut s'avérer un choix regrettable pour un couvent. En effet, certaines nonnes-malgré-elles peuvent mener la vie dure à leurs consoeurs et semer le trouble dans la communauté, refuser de s'en tenir aux règles et être cause de scandales. Parfois, les religieux doivent requérir au bras séculier pour calmer les forcenés.

     

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     Le cas inverse semble être plus fréquent : au XVIIIe siècle, il y aurait plus de vocations contrariées que de vocations forcées, plus de jeunes filles qui doivent vaincre l'opposition de leurs parents pour prendre le voile que de parents qui contraignent leur fille à se faire nonne.

     

    Entre ces deux extrêmes, il y a une situation intermédiaire qu'on peut raisonnablement supposer. Certains monastères, à cet époque, sans être réellement relâchés, offrent une vie relativement commode de dames en chambre. Le couvent peut s'avérer une voie honorable à celles qui ne tiennent pas à contracter mariage ou qui ne le peuvent pas, à cause d'un revers de fortune, d'un accident de santé, etc. Les filles qu'on ne peut caser nulle part,  peuvent s'accommoder d'une vie de dévotion qui leur laisse une liberté relative, sans avoir une réelle vocation.

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    C'est ce qu'on peut déduire quand on voit le train de certaines de ces dames à l'époque. Ainsi les cisterciennes d'Herkenrode refusent d'adopter l'habit de leur ordre pour garder leur tenue noire qu'elles jugent plus seyantes. On voit leur coiffe, au fil des siècles, s'empeser et se courber pour mettre en valeur leur figure, avec beaucoup de coquetterie . Elles refusent de s'assujettir à une clôture étroite qui, selon elles, feraient fuir les candidates. Les abbesses vivent dans de petits palais et ont leurs aises. En dehors de celui de dire l'office, les moniales capitulantes n'ont pas de réelles obligations contraignantes.

     

    Revenons-en à l'oeuvre de Diderot.  Le roman, rédigé par épisodes, ne sera édité qu'à titre posthume en 1796. Dans les années soixante, le réalisateur Jacques Rivette en entreprend une adaptation cinématographique. Mais le film se heurte à la censure avant même sa sortie en salle. On tente de l'interdire. L'oeuvre est considérée comme blasphématoire et déshonorante pour les religieuses. Le film finit par être autorisé en 1967 mais interdit au moins de dix-huit ans. On peut le trouver actuellement en entier sur la toile, avec des sous-titres en espagnol.  Il est probable qu'il ne restera pas très longtemps en ligne.

     

     

    Le film colle plutôt au texte de Diderot, mais il prend le parti d'inverser la fin du roman. En effet, dans le texte, Suzanne, après sa fuite, atterrit dans un milieu libertin qu'elle fuit pour préserver sa vertu et se retrouve à travailler comme blanchisseuse. Dans le film, elle passe du statut de blanchisseuse à celui de mendiante pour finir par se retrouver parmi des libertins et préfère se donner la mort. L'ensemble du film est marqué par une étonnante sobriété et la réalisation est novatrice pour l'époque, même si, aujourd'hui, on peut trouver l'ensemble vieilli.

     

    Dernièrement, j'ai appris qu'une nouvelle adaptation venait d'être tournée [l'article a été rédigé en février 2013] et avait été présentée dans un festival. À en juger par la bande annonce, le ton est tout autre. La Suzanne de Rivette est forte et empreinte de dignité dans son malheur. Celle de Nicloux adopte, tout au long de la bande annonce, un ton larmoyant.

     

    Naturellement, il faudrait avoir vu le film en entier pour en juger. Seulement, rien que dans la bande annonce, on relève pas mal d’éléments incohérents. La première chose qui fait mal aux yeux, ce sont les costumes des nonnes. Je ne connais aucun ordre, aucune congrégation qui a un habit aussi ... haut en couleur que celles du premier couvent. Même en glanant sur la toile, je ne trouve aucune trace d'un ordre portant un habit bleu-gris une guimpe carrée et arborant un scapulaire écru aux allures de cuculle. Tout au juste ai-je appris l'existence de l'ordre des religieuses de la pénitence de Jésus-Christ, dites "sachettes" parce qu'elles paraissaient vêtues d'un sac. Elles ont disparus de Paris vers la fin du XIIIe siècle. Certains disent que leur habit était bleu ou gris, sans en être sûrs.

     

     

     Alors de quoi s'est inspiré le réalisateur ? Je ne demande qu'à l'apprendre. L'héroïne de Diderot est censée être entrée à Longchamps, une abbaye de clarisses. Je ne connais aucune clarisse avec un habit semblable. D'ailleurs, ces nonnes portent une ceinture de cuir et non une corde, la marque de la famille franciscaine.

     

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    Ces soeurs ont une guimpe carrée comme les Visitandines, les couleurs de leur habit sont l'inverse des annonciades célestes (ou célestines) qui portent un habit blanc avec un scapulaire et un manteau bleus. Dans ces deux familles religieuses, comme dans beaucoup d'autres, on utilisait, autrefois, un drap mortuaire lors de la profession religieuse.

     

     

     

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    La cérémonie de profession n'est pas mal non plus dans le genre. Cinq filles s'apprêtent à faire prononcer leurs voeux avec une étrange coiffe sur la tête. Il est vrai que la cérémonie de profession reprenait autrefois celle de la prise d'habit, ce n'est pas pour autant qu'on laissait guimpe et voile au vestiaire. C'est plutôt la ceinture qu'on aurait laissée de côté, puisqu'elle est un élément constitutif de l'habit. Quant au fameux drap mortuaire, c'était après avoir prononcé les voeux et pris le voile noir que les nouvelles professes en étaient recouvertes, et pas avant.

     

    Le nombre de candidates à la profession est assez ahurissant. Il suffit d'un rapide calcul pour se rendre compte de l'incohérence. Cinq nouvelles nonnes par an entraineraient un accroissement exponentiel de la communauté.  A moins que les soeurs ne tombent comme des mouches, une fois leurs voeux prononcés, il faudrait compter sur une communauté de deux cents nonnes.

     

     

     Sur cet extrait, je compte une quinzaine de novices pour une trentaine de professes, un déséquilibre important. Les novices représentent deux cinquièmes de la communauté, ça ne tient pas la route. Une nonne ne passait qu'un an au noviciat à cette époque, deux ans, dans certains ordres, parti que prend Diderot. Si la nonne entre au noviciat à dix-huit ans et qu'elle décède à soixante ans, elle passe un vingtième de sa vie religieuse au noviciat pas deux cinquièmes. Une abbaye du XVIIIe siècle n'est pas la maison mère d'une congrégation apostolique du XIXe siècle qui envoie des novices à ses filiales une fois leur voeux prononcés. Nous ne sommes pas dans "Au risque de se perdre" !

     

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    Autre détail cocasse, si les pensionnaires et les novices ont la place qui leur revient au réfectoire, on les retrouve pêle-mêle au choeur. A la chapelle, en procession comme au réfectoire, les nonnes se rangent par rang de profession et, pour les novices, par date d'entrée au couvent. On devrait logiquement trouver regroupées les pensionnaires et les novices, encadrées seulement des professes qui ont la charge de s'en occuper.

    Un autre détail qui fait sourire, c'est la façon dont Suzanne arrache sa guimpe et son voile,  sans la dénouer ou sans enlever l'épingle. Somme toute, la meilleure façon de se faire mal. De même, un scapulaire à bretelles doit être maintenu par des épingles, sinon il ne tient pas en place, il va de droite à gauche et le désordre dans la tenue est fort mal vu chez les nonnes.

      

     

    Question costumes, on s'y retrouve mieux pour le second monastère. En effet, Saint-Eutrope était, à l'époque, un couvent d'annonciades et, à quelques détails près, c'est l'habit des annonciades qu'arbore Isabelle Huppert. Diderot semble ignorer que ce couvent, sis à Arpajon, était consacré au soin des malades. D'ailleurs, l'écrivain a écrit sainte-Eutrope au lieu de saint-Eutrope. Je ne m'attarderai pas sur l'épisode de l'abbesse saphique. Penser que les couvents de femmes sont peuplés de lesbiennes relève du phantasme. La proportion d'homosexuels est la même au cloître qu'ailleurs. D'ailleurs, il est plus courant de voir une sexualité refoulée que déclarée chez les religieux de cette orientation. La supérieure de sainte-Eutrope a-t-elle été inspirée par Louise-Adélaïde, fille du régent, devenue abbesse de Chelles ? Pour le moment, je n'ai encore rien trouvé de convainquant pour l'étayer. La personnalité de l'abbesse de Chelles est loin de faire l'unanimité.

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    Crédits photos: Marie de L'incarnation, libre de droits ; The nun's story, WB ; La religieuse, Jacques Rivette, captures d'écran ;La  relgieuse, Nicloux, captures d'écran; Barbara de Rivière d'Arschot, grootheers.be ; dessin d'anonciade d'après photo, portrait de Jeanne de Valois, libre de droits; Le diaalogue des carmélites, P.Agostini, captures d'écran; Reucueil de tous les costumes des ordres, tome 4,Googlebooks.


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  • Après des notes un peu lourdes, je vais faire une petite pause musicale et priante

     


    Ps 23 Cantique de David.
    L’Eternel est mon berger: je ne manquerai de rien.
    2 Il me fait reposer dans de verts pâturages,
    Il me dirige près des eaux paisibles.


    3 Il restaure mon âme,
    Il me conduit dans les sentiers de la justice,
    A cause de son nom.


    4 Quand je marche dans la vallée de l’ombre de la mort,
    Je ne crains aucun mal, car tu es avec moi:
    Ta houlette et ton bâton me rassurent.


    5 Tu dresses devant moi une table,
    En face de mes adversaires;
    Tu oins d’huile ma tête,
    Et ma coupe déborde.


    6 Oui, le bonheur et la grâce m’accompagneront
    Tous les jours de ma vie,
    Et j’habiterai dans la maison de l’Eternel
    Jusqu’à la fin de mes jours.

     

     

    Reste avec moi. C'est l'heure où le jour baisse ;
    L'ombre grandit ; Seigneur, reste avec moi.
    Quand les autres appuis échouent et que le réconfort me fuit,
    Force du faible, ô Seigneur, reste avec moi.

    Le flot des jours rapidement s'écoule ;
    Les joies de la terre s'obscurcissent, ses gloires disparaissent ;
    Je le vois, tout change et s'écroule autour de moi ;
    O Toi qui ne changes pas, reste avec moi.

    Heure après heure, j'ai besoin de Ta présence :
    Quoi d'autre que Ta grâce peut déjouer le pouvoir du tentateur ?
    Qui donc, comme Toi, peut être mon guide et mon séjour ?
    Dans l'ombre ou la clarté, Seigneur, reste avec moi.

    Je ne crains aucun ennemi, quand Tu es est là pour bénir ;
    Les maux n'ont plus de poids, et les pleurs plus d'amertume.
    Mort, où est ta victoire ? Mort, où est ton aiguillon ?
    Je triomphe toujours, si Tu restes avec moi.

    Montre-moi Ta croix avant que je ne ferme les yeux,
    Brille dans l'obscurité et dirige-moi vers les cieux.
    Le matin du Paradis s'entrouvre, et les ombres vaines de la terre s'enfuient ;
    Dans la vie et la mort, O Seigneur, reste avec moi


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  • Comme toujours, l'histoire que vous allez lire est vraie, seuls les noms ont été changés pour préserver la réputation des innocents.

    Pour ne pas jeter le discrédit sur un ordre religieux qui a souffert et souffre toujours de la situation, nous l'appelerons ordre de St Ores, un saint qui n'existe pas.

    Épisodes précédents : Sr Fausta, soeur orésienne depuis quinze ans a semé le trouble dans plusieurs couvents de Flandres.Apmrès son renvoi d'un couvent en Terre Sainte, elle échoue dans une communauté en mauvaise posture , prête à  fermer et en devient la supérieure après un an. A la suite d'une parole malheureuse de l'évêque du lieu, elle se met en tête d'accueillir des novices.

     

    L'une ou l'autre candidate se présente mais ne reste pas : âge avancé, pas de santé. Mais un jour, une religieuse française s'annonce au parloir. Soeur Pauline est entrée à l'âge de dix-neuf ans dans la congrégation où elle a été pensionnaire durant sa scolarité. Elle enseigne dans un établissement des environs. Depuis quelques temps, elle ressent un manque dans sa vie spirituelle et aspire à une vie de prière plus profonde. Ses supérieures la découragent dans cette voie. Considèrent-elles celle-ci comme une fuite ? Pensent-elles que Sr Pauline pourrait trouver une réponse à ses aspirations en changeant simplement d'affectation au sein de leur institut ?

     

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     Sr Pauline trouve une oreille attentive auprès de Mère Fausta. Et malgré l'avis contraire des supérieures de la religieuse française, elle décide de l'admettre au noviciat du monastère. Bien que Sr Pauline aborde la quarantaine, elle ne se montre pas moins très souple et d'un caractère prompt à s'adapter. Elle déborde de qualités chrétiennes : douce, serviable, patiente, prompte à reconnaître ses erreurs. Peut-être un peu trop d'ailleurs, car son esprit critique tend à fondre comme neige au soleil devant la forte personnalité de Mère Fausta.

     Sr Pauline ne reste pas longtemps seule au noviciat. Une autre personne se présente peu de temps après elle, une femme de la même tranche d'elle avec un parcours professionnel d'infirmière derrière le dos : Alexandra. Celle-ci partage quelques points communs avec Fausta. Elles ont toutes les deux la même langue maternelle. En effet, si elle vit depuis plus de vingt ans en francophonie, Alexandra est flamande et vient, elle aussi, d'une famille nombreuse très traditionnelle. Elle a grandi dans une atmosphère rigoriste et a des opinions assez tranchées. Son caractère ne l'est pas moins. Elle peut se montrer d'une très grande générosité et d'une abnégation certaine, mais elle peut aussi entrer dans des colères monstres pour des futilités.

     Bien qu'elle se soit aperçue de ce handicap de caractère fort gênant dans une vie en communauté, Fausta l'admet tout de même au noviciat, en gageant que la candidate pourra, à force d'effort, arrondir les angles de sa personnalité carrée.

     

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    Fausta se sent proche de ses novices qui ne sont pas beaucoup plus jeunes qu'elle. Elle ne manque pas de les valoriser. Contrairement aux usages, à sa prise d'habit, Sr Pauline reçoit le voile noir des professes et non le blanc des novices. N'a-t-elle pas déjà fait profession dans sa congrégation ? argue Mère Fausta. Quant à Alexandra, elle lui confie dès son entrée des responsabilités importantes, elle devient l'infirmière de la communauté et reprend en mains l'économat alors qu'elle n'est que postulante. 

     Deux autres candidates ne tardent pas à postuler, toutes les deux flamandes : Magada et Ria. Magda est une connaissance de Caroline. Ria a pour père spirituel un père orésien, le père Berthold qui se rend, de temps à autre dans la communauté.

     

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     Ce début des années quatre-vingts marque un tournant pour les sœurs de St Hilaire. Élue supérieure pour un second mandat de trois ans, Mère Fausta profite de l'arrivée des novices pour resserrer la vis et rétablir ce qu'elle considère comme une vie religieuse régulière. Les sœurs qui, jusqu'alors vivotaient en attendant une fermeture qui tardaient à venir, se voient imposer un nouveau rythme, de nouvelles exigences. Des usages anciens qui étaient tombés dans l'oubli refont peu à peu surface.

     

    La supérieure s'est arrogée le titre de maîtresse des novices, puisque, avance-t-elle, aucune des sœurs âgées n'est en mesure d'assumer cette tâche. Et, enfreignant les constitutions des sœurs orésiennes, elle omet de se faire seconder dans cette office par une des anciennes de la communauté.

     

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    La réouverture du noviciat entraîne également une fissure dans la communauté, entre deux groupes : les âgées, les anciennes, celles qui sont là depuis des décennies et les jeunes, les nouvelles, qui deviennent peu à peu étrangères au vieil esprit de la communauté, à son histoire. Le soeurs orésiennes qui avaient échoué dans cette communauté mourante parce qu'on ne voulait plus d'elles ailleurs s’accommodent mal de tous ces changements. Leurs fort caractères se heurtent aux nouvelles prétentions de la supérieure, à son caractère enjôleur, séducteur et manipulateur.

     La tourière laïque, Caroline, voit la personnalité de Mère Fausta, qu'elle croyait connaître, changer au contact d'Alexandra. Il faut dire que ces deux-là font la paire. Elles deviennent rapidement inséparables, même si Alexandra qui se sent phagocytée par sa supérieure tente en vain de rétablir les distances dans des crises de colère mémorable. Une relation d'un caractère trouble et complexe se nouent entre elles deux.

    Crédits photos : Culture pub, The Black Narcisse, photo personnelle.

    Episode 1 , épisode 2épisode 3épisode 4épisode 5


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  • Comme toujours, l'histoire que vous allez lire est vraie, seuls les noms ont été changés pour préserver la réputation des innocents.

     

    Pour ne pas jeter le discrédit sur un ordre religieux qui a souffert et souffre toujours de la situation, nous l’appellerons ordre de St Ores, un saint qui n'existe pas.

     

    Épisodes  1 et 2 : Sr Fausta, soeur orésienne depuis quinze ans a semé le trouble dans plusieurs couvents de Flandres. Elle s'envole pour la Terre Sainte mais la communauté la renvoie au bout de six mois. Elle échoue alors dans une communauté de Wallonie, très pauvre humainement et près de fermer.

     

    Durant tout une année, Sr Fausta partage le quotidien des soeurs de St Hilaire. Elle n'a pas d'emploi particulier, elle donne un coup de main, à gauche et à droite, surtout à la cuisine. Comme la vie a perdu beaucoup de sa régularité, il n'est pas difficile de se faire une place dans une communauté au bord de l'éclatement. 

     


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    Bientôt le mandat de la prieure atteint son terme, le vicaire épiscopal chargé des affaires canoniques à l'évêché réunit les soeurs. Depuis plusieurs années elles ont des supérieures de remplacement. Que vont-elles faire ? Il y a cette "jeune" soeur, venue pour aider, elle n'a pas encore quarante ans. Jusque là, elle donne satisfaction, elle fait son possible, elle se dévoue auprès des aînées. Si les soeurs entérinent le transfert, on pourra l'élire à la tête de la communauté. 

     

    Et c'est ce qui arrive. Le délégué de l'évêché n'a aucune idée du passé de Sr Fausta, des troubles qu'elle a causés ailleurs. La communauté qui l'accueillie non plus, d'ailleurs. Entre le nord et le sud, il y a la barrière de la langue. Au nord, c'est la branche masculine et son provincial qui fait office de liaison entre les communautés de l'ordre. Au sud, cette branche est en voie d'extinction, elle ne s'occupe pas des soeurs qui ont d'avantage de rapports avec l'évêché.

     

    Durant le premier mandat de supérieure, un mandat de trois ans, les choses se passent plutôt bien. Sr Fausta commence à réorganiser peu à peu la vie communautaire qui s'était décomposée. Elle y va progressivement, par petites touches. Elle fait venir un nouveau médecin, fraîchement sorti de la faculté, qui prescrit des traitements plus appropriés. Elle organise des réunions communautaires, propose quelques travaux de rafraîchissements, pour la chapelle. Les religieuses sont encore alertes, même si elles ne sont plus de première  jeunesse. Elles apprécient, pour la plupart, cette redynamisation, le soin que l'on apporte à leur santé...

     

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    Les choses auraient pu bien se passer si Sr Fausta avait gardé en tête qu'elle était là pour permettre à la communauté de finir en beauté. Mais une parole d'encouragement d'un évêque peu au courant d'affaires qu'il  délègue à un de ses vicaires est prise pour ce qu'elle n'est pas par la religieuse. Cela devient un but, une idée fixe, un plan démentiel ... accueillir des novices.

     

     Si les candidates ne se bousculent pas (encore) au portillon, Sr Fausta a déjà accueilli au quartier des hôtes, une femme qu'elle a connue dans l'institut séculier qui l'a hébergée, Caroline. Caroline est neurasthénique, elle a besoin de repos. Sr Fausta lui propose de devenir la portière laïque du monastère. Elle secondera la tourière, Sr Sophie, marquée par le poids des ans. Caroline travaillera au pair, sans véritable rémunération.

     Crédit photos : photo personnelle, CulturePub

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    C'est la question qu'on vient de me poser, il n'y a pas longtemps. Empêcher physiquement quelqu'un de partir relèverait de la séquestration et tomberait sous le coup de la loi.

    Donc non, on ne peut pas empêcher un religieux de s'en aller, s'il veut quitter sa congrégation, son monastère. Mais parfois, il y a des pressions. En général, la personne qui s'en va est en crise et cela peut peser sur l'ambiance de la communauté. Mais certaines personnes bien intentionnées croient qu'on peut résoudre la crise, avec un soutien approprié, des bons conseils, etc.

    Il peut arriver que les supérieurs ne veulent pas voir la vérité en face : un moine sort nuitament rejoindre sa maîtresse, une religieuse perd la foi dans des éléments essentiels du catholicisme, une autre se sert de sa position d'économe pour puiser dans la caisse ... on temporise, on pense que le temps va arranger les choses, ...

    Mais le temps n'arrange rien, il faut se rendre à l'évidence. Dans le meilleur des cas, la communauté ou la congrégation trouve un arrangement avec le ou la sortante. On lui remet un pécule de départ, on s'assure que le sortant à un endroit où aller.

    Dans d'autres cas, il y aura des pressions pour temporiser, montrer les inconvénients qu'entraînera la sortie, on rechignera à aider financièrement le membre sortant, on coupera tout dialogue avec lui, le considérant comme un étranger. Cela peut arriver, mais ce n'est pas la norme. En général, les choses se passent plutôt bien. Les supérieurs finissent par se rendre compte que le départ est la meilleure solution pour tout le monde et surtout qu'il faut respecter le chemin de tout un chacun.

     

    Crédit photos: The nun's story WB, capture d'écran


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