• Chronique de dérives en cascade — 8

     Comme toujours, l'histoire que vous allez lire est vraie, seuls les noms ont été changés pour préserver la réputation des innocents.

     

    Pour ne pas jeter le discrédit sur un ordre religieux qui a souffert et souffre toujours de la situation, nous l'appellerons ordre de St Ores, un saint qui n'existe pas.

     

    Sr Fausta, soeur orésienne depuis près de vingt ans, a semé le trouble dans plusieurs couvents de Flandres et s'est fait renvoyer d'un autre en Terre Sainte. Elle échoue dans une communauté près de sa fin, joue de son charme et en devient  la supérieure. Elle accueille ses premières novices et impose au couvent un mode de vie déséquilibré. Une relation trouble la lie à l'une d'elle , Alexandra, à qui elle confie prématurément, pas mal de responsabilités. Des novices et une soeur conventuelle préfère quitter le monastère et les premières plaintes parviennent aux oreilles des responsables ecclésiastiques. Pourtant deux jeunes filles , Marie-Noëlle et Martine entre dans ce couvent.

     

     

     Martine entre à saint-Hilaire au courant de l'été 1986. Ses parents, à qui elle avait confié le soin de gérer ses actions en bourse, préfère les donner à Mère Fausta, considérant qu'une dot doit être donnée au couvent.  La religieuse a toujours dit que l'argent qu'une candidate amène en entrant est placé et que seuls les intérêts vont au couvent. Pourtant quand soeur Angeline a rejoint sainte-Barbe, la supérieure a été bien embarrassée pour faire passer cette dot à la nouvelle communauté. Elle a dû procéder par versements successifs. L'argent censé être placé avait été dépensé.

     

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    Mère Fausta a assuré  Martine que le courrier qui arrivait au couvent était rendu tel quel aux religieuses et que les lettres que les sœurs envoyait n'était pas lues. Mais quand elle explique à la jeune postulante comment  certaines petites pratiques du couvent, elle lui raconte que Marie-Noëlle lui donne ses lettres à lire avant de les envoyer, que ce sont ces parents qui lui ont demandé de le faire, qu'elle ne doit pas s'étonner de cela.  Il passe bien par la tête de Martine qu'elle ne s'en serait pas aperçue, qu'elle n'irait pas regarder si les lettres de Marie-Noëlle sont ouvertes ou non. Mais Mère Fausta a une telle aura que l'idée ne fait que traverser son esprit très rapidement. La jeune fille se demande si elle ne devrait pas en faire autant. Mère Fausta assure qu'elle la laisse libre, que cela lui permettrait de mieux la connaître, mais qu'elle fera comme elle veut, et que si un jour elle remet son courrier fermé, après l'avoir remis ouvert, elle ne posera aucune question. Martine décide donc de laisser ses lettres ouvertes, parce qu'elle ne veut pas faire les choses à moitié et qu'elle veut tout donner à Dieu.

     

    Et pourtant, quelques mois plus tard, quand Martine va prendre l'habit, elle envoie un courrier pour  clôturer son dernier compte en banque et le remet fermé, Mère Fausta vient la trouver, elle lui reproche son manque d'ouverture, de faire des choses cachément. Elle l'accuse de ne pas lui avoir parlé d'un courrier de son père spirituel qu'elle a invité à sa vêture. Martine ne pourrait pas lui en parler, pour la bonne et simple raison qu'elle ne l'a pas reçu.  Le discours de la supérieure ne tient pas debout, mais la jeune candidate passe allègrement par-dessus toutes ces contradictions.

     

     

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    Les contradictions sont pourtant nombreuses. Une fois que Martine a pris l'habit, elle voit l'attitude de la prieure changer à son égard. Elle se montre susceptible, colérique, versatile. Alors que le noviciat est consacré à la formation et suppose que la candidate puisse consacrer plus de temps à la prière et à la lecture, Martine et Marie-Noëlle se voient constamment surchargées de travail. On leur en demande plus que de temps dont elles ne disposent.

     

    Bien des fois, Martine voit des choses, des situations, qui lui apparaissent comme anormales, mais elle se tait, elle n'ose rien dire. Mère Fausta lui fait une telle impression qu'il lui serait difficile de la contredire. Et pourtant ... Pour sa fête, Mère Fausta a reçu des cadeaux des sœurs. Sœur Jeanne, âgée et de mauvaise santé, lui a fabriqué une crèche en contreplaqué. Lorsque cette dernière vient au bureau de Mère Fausta alors que celle-ci est en conversation avec Martine, la supérieure se plaint du présent, dit qu'elle ne sait qu'en faire, qu'il lui aurait fallu un cadeau utile. Sœur Jeanne suggère qu'on peut le donner aux frères et sœurs de Sœur Marie-Noëlle, mais la supérieure rétorque sèchement que les enfants d'aujourd'hui veulent "du beau".

     

     

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    Il est évident que Sr Marie-Noëlle n'est pas à sa place dans un couvent, malgré toute sa piété. Cette jeune sœur a trop de tempérament, elle vit sur le nerfs, ne sait pas se plier aux règles, respecter une consigne, un interdit. Son caractère primesautier se heurte souvent à celui de sa maîtresse des novices et à celui, plus colérique, de Sr Alexandra. Pourtant Mère Fausta ne manque pas de la laisser sous la responsabilité de cette dernière, en ce qui concerne le travail. Les deux nonnes se disputent le plus clair de leur temps.

     

    Ces disputes prennent des allures de scènes violentes, au point verbal. La Mère Fausta, sous couvert d'aider à comprendre l'autre, distille sournoisement des informations peu valorisantes d'une soeur à une autre. Manquant à la plus élémentaire discrétion, elle révèle lors d'entretiens privés des détails recueillis sous le sceau de la confidence, concernant la vie et la famille des novices. Mais elle enrobe si bien les choses et la fascination qu'elle exerce sur ses jeunes recrues est telle qu'elles ne se récrient pas en entendant de telles indiscrétions.

     

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    Loin "d'aider à comprendre" ces détails indiscrets sèment la suspicion et le discrédit entre les sœurs, surtout les plus jeunes. Ils entretiennent un climat de suspicion et d'hostilité, favorisent la délation de menus manquements. Sr Martine se croit obligée d'avouer tout ce qui lui tape sur les nerfs dans le comportement de Sr Marie-Noëlle alors qu'elle n'aurait tout simplement ignorer pas mal de choses, si Mère Fausta n'avait insidieusement porté son attention sur les petits côtés de sa compagne de noviciat. 

    Lors de ses frottements avec cette novice qui la prend parfois en défaut, Mère Fausta proteste souvent de son "humilité", un mot qui lui revient souvent à la bouche, pourtant le fait est qu'elle ne supporte pas la contradiction. Très souvent, elle met en avant que, selon les termes de la règle, Dieu l'a placée à cette place et qu'il a dit aux chefs des Eglises "qui vous écoute, m'écoute". Elle tient donc que sa parole est "parole de Dieu" et que ne pas l'écouter, la prendre au sérieux est un manque de foi. Et cela qu'il s'agisse de choses spirituelles comme d'autres, des plus banales comme de déplacer un vase ou d'ouvrir une porte. Si une sœur oublie l'une de ses recommandations, comme de mettre tel ingrédient dans la soupe, il s'agit donc, pour Mère Fausta, d'un manque de foi.

     

     

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    Une sœur prend-elle une initiative, sans la consulter, parce qu'il s'agit d'une chose ordinaire, qui lui semble aller de soi ? Elle manque à l'obéissance, parce qu'elle n'a pas demandé l'avis de la supérieure. Mais si la sœur prend la peine de la consulter pour ce genre de détail insignifiant et qu'elle la dérange lorsqu'elle est en train de travailler,  cette sœur est un bébé, une irresponsable, on ne peut pas compter sur elle. Mère Fausta est quelqu'un avec qui on ne sait jamais sur quel pied danser et avec qui on se demande toujours si on fait bien ou mal en agissant comme ceci ou comme cela.

     

    Mère Fausta sait toujours mieux que vous ce que vous pensez et ce dont vous vous souvenez. Elle fait une scène à une novice parce qu'elle ne trouve pas un numéro d'une revue religieuse dans la bibliothèque du noviciat dont cette sœur est responsable. Elle a abonné le noviciat à cette revue, dit-elle haut et fort, mais la novice qui est là depuis près deux ans n'en a jamais vu aucun exemplaire. Elle hausse le ton, menace d'aller chercher la souche du bulletin de virement. La novice bredouille : elle n'a aucun souvenir d'avoir reçu cette revue. Mère Fausta la gronde en l'accusant de n'avoir pas d'ordre, puis s'en va, mécontente. 

     

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    S'il est bien un calvaire pour Sœur Martine et Sœur Marie-Noëlle se sont bien les répétitions de chant. Non seulement elles se prolongent à l'infini, sans le souci du respect de l'horaire — Mère Fausta n'a aucun scrupule à empiéter sur l'heure où l'office doit commencer, tant pis pour le reste de la communauté qui l'attend respectueusement pendant parfois plus de vingt minutes — Mais en ce domaine aussi Mère Fausta prétend en connaître plus que ses deux novices. Pourtant l'une et l'autre ont accompli leur cursus de solfège en entier et joue chacune d'un instrument. La prieure argue de son approche "priante" du chant pour ne pas respecter une partition. Elle prend ses libertés avec la mélodie, les autres n'ont qu'à la suivre et retenir celle qu'elle veut chanter. Quant au rythme, elle ne sait pas trop de quoi il s'agit. 

     

     Crédits photos : La religieuse, Rivette ; Sister Act ; femmez et religieuses (captures d'écran).

     

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